1. Ayant achevé de redire devant les trois cette réponse que Je mettais dans son cœur, Mathaël s’étonna lui-même de cette vérité qu’il entendait en lui et de cette parole intérieure qu’il n’avait jamais ressentie avec une telle clarté.
2. Cependant, Raphaël lui dit : « Vois-tu à présent combien le Seigneur est éveillé même lorsqu’il dort selon le corps, et comme tu as pu entendre Sa parole claire et nette dans ton cœur et la répéter ensuite à haute voix de ta bouche de chair ? !
C’est de cette manière que nous percevons nous aussi très vivement et très activement la parole et la volonté du Seigneur, si bien que nous devenons tout entiers Sa parole et Sa volonté !
Et si nous sommes cela, nous sommes aussi l’acte même accompli par Sa parole et Sa volonté, donc parole, volonté et acte réunis dans la même forme ! — Comprends-tu clairement tout cela à présent, ami Mathaël ? »
3. Mathaël dit : « Quand même l’on croit avoir acquis l’apaisante certitude de tout comprendre dorénavant au premier regard, c’est alors que se présente quelque nouveauté à quoi l’on n’avait jamais songé !
Tout cela me fait comprendre qu’il y a dans la sagesse divine une profusion et une profondeur si incommensurables que jamais aucun esprit ne l’embrassera tout entière ! Nous aurons donc éternellement quantité de nouvelles choses à apprendre et à comprendre, et c’est aussi bien ainsi !
4. Car en vérité, je n’aimerais pas que tout soit désormais aussi clair pour moi que pour le Seigneur Lui-même. S’il n’y avait plus rien qui me fût inconnu dans tout l’infini, j’en aurais bientôt assez de la vie ;
mais ainsi, il nous reste une quantité si infinie de choses profondément cachées que nous n’en viendrons jamais à bout, et de plus, je dois bien admettre maintenant que la félicité de Dieu ne serait absolument pas enviable si nous, Ses créatures et Ses enfants, nous comprenions toute chose aussi clairement que Lui-même,
et Sa parfaite sagesse illimitée et éternelle Lui deviendrait sans doute terriblement fastidieuse s’il ne devait plus S’en servir que pour Lui seul !
5. Et c’est pour cela qu’il a empli l’espace infini d’innombrables œuvres selon Sa sagesse et Sa puissance illimitées, et qu’il a créé des êtres pensants et dotés eux aussi d’une grande sagesse.
Ces êtres, que la grande sagesse et l’omnipotence de Dieu ont toujours étonnés au plus haut point, ne cessent de découvrir et d’admirer cette profonde sagesse divine et cette puissance de l’unique Créateur,
et, à chaque nouvelle révélation, sont à nouveau transportés par l’admiration, l’adoration et l’amour le plus intense !
6. Cela seul doit être pour Dieu la vraie félicité ! Pour Lui, le Créateur et le Père des anges, des mondes, des hommes et des enfants, ce doit être en soi le plus grand des délices que de rendre Lui-même toujours plus heureux tous ceux qui Le reconnaissent et L’aiment sans cesse davantage, Lui et Sa parole !
7. Et c’est pour nous apporter, à nous, hommes de cette terre, à vous, anges de tous les cieux, et à toutes les créatures de l’infini tout entier, une félicité plus grande encore, qu’il est venu à nous en personne sur cette terre, afin de Se révéler véritablement à nous, en tant qu’homme de chair et de sang Lui-même, comme un homme s’ouvre à un autre.
Ami, que tu sois créature ou ange éternel, ou homme comme moi, le Seigneur ne fait pas cela uniquement pour l’amour de nous, mais Il le fait aussi pour Lui-même ; car à la longue, Il périrait d’ennui si, dans Son omniscience,
il Lui fallait percevoir en Lui-même avec la plus grande clarté qu’étant une intelligence parfaitement sans forme et éternelle, bien qu’absolument accomplie, Ses créatures ne pourraient jamais Le voir et encore moins Lui parler, et qu’il devrait demeurer à jamais inconnu !
8. Ne serait-ce donc pas la chose la plus triste pour un père terrestre s’il avait par exemple vingt enfants tout à fait gracieux, mais tous aveugles et sourds, et que ce père plein d’amour ne pût donc jamais échanger une parole avec eux ni leur montrer son apparence humaine ? !
Imaginez sérieusement une telle situation : un père très fortuné ayant vingt enfants des deux sexes merveilleusement faits extérieurement, mais tous aveugles et sourds !
Je le demande, un tel père ne dépenserait-il pas des sommes considérables pour que ses petits enfants par ailleurs si aimables puissent voir et entendre ?
Et quelle ne serait pas sa tristesse s’il n’existait au monde aucun moyen pour que ses enfants puissent voir et entendre !
9. Nous, les hommes, nous nous voyons et nous entendons sans doute les uns les autres et prenons si grand plaisir à être ensemble — parfois même plus qu’il n’est nécessaire — que nous sommes capables d’en oublier notre Créateur ;
et notre bon et saint Créateur, notre Père très sage eût dû être privé pour toujours du bienheureux plaisir d’être jamais reconnu, vu et entendu de Ses enfants ! C’était parfaitement inconcevable pour un Père éternel empli de l’amour le plus grand et le plus pur pour Ses enfants !
10. Il y a à coup sûr en Lui l’aspiration suprême à nous voir, nous, Ses enfants, accéder à l’état qui, selon Son ordonnance, nous rendrait capables de Le voir, de L’aimer en tant que personne et de communiquer avec Lui sans préjudice pour notre existence —
plutôt que de voir en nous des enfants qui continuent de n’avoir aucune notion de ce qu’est véritablement l’être essentiel du Père éternel.
11. Aussi crois-je que ce n’est pas une pure invention de ma part si je dis : ce n’est pas uniquement pour nous, mais aussi pour Lui-même que le Seigneur S’est incarné dans la chair sur cette terre et est ainsi venu à nous, Ses enfants certes encore fort mal dégrossis !
Il avait prévu de toute éternité de faire cela ; et nous, nous sommes à présent témoins de la mise en œuvre de ce grand projet éternel ! — Dis-moi, Raphaël, si ce que je viens de dire est juste ou non. » GEJ3 CH238 Chapitre premier (retour-du-christ.fr)