Des raisons de l’attitude des templiers envers le Seigneur

1. Alors, prenant courage, un ancien répondit : « Vous avez bien raison, nobles Romains qui êtes nos souverains, de nous faire ce reproche trop longtemps mérité ; car, nous qui sommes depuis si longtemps à la source la plus pure, nous ne voulons pas y boire !

Mais à qui la faute ? Celui qui possède un trésor ne l’estime pas autant que celui qui ne l’a pas et qui, le désirant, fera tous ses efforts pour s’en emparer !

Lorsque nous entendons parler de prophètes ou de sages étrangers, nous aspirons à leur sagesse : mais nous ne respectons pas ceux de notre pays, parce que nous les connaissons depuis leur naissance et que nous disons, lorsqu’ils se manifestent :

“D’où lui viennent donc cette sagesse et ces pouvoirs miraculeux ?”

Bref, les hommes, et surtout nous, Juifs déjà d’un certain âge, deviennent paresseux et indifférents envers toute nouveauté, si extraordinaire soit-elle ; car la vie paisible à laquelle nous nous sommes accoutumés recule devant toute tâche supplémentaire,

et c’est pour cette seule raison que nous sommes ennemis de tout ce qui semble vouloir troubler notre tranquillité et notre agrément.

2. En nous-mêmes, nous voyons bien et même tout à fait clairement quels sont nos torts, et pourtant, nous ne pouvons-nous empêcher d’éprouver du ressentiment envers ceux qui nous gênent. À qui la faute ?

À cette vieille habitude que nul ne troublait plus depuis longtemps ! Ainsi, plus l’événement qui dérange notre agréable tranquillité est d’une évidence criante, plus son effet sur nous est fâcheux et plus nous lui résistons.

3. Vous autres Romains, vous êtes maîtres d’un grand et puissant empire et vous trouvez vous aussi fort bien lorsque la paix y règne : mais si vous apprenez que le peuple s’est soulevé contre vous dans quelque partie de cet empire,

 vous ne vous demandez pas si ce n’est pas à bon droit, parce qu’il était trop opprimé, que ce peuple s’est soulevé, mais vous lui envoyez sans retard une puissante armée qui le châtie sans ménagement ni merci, qu’il soit ou non dans son bon droit.

Pourquoi en est-il ainsi ? Parce que ce peuple révolté a quelque peu troublé votre tranquillité. Tenant conseil, vous vous demandez comment ce petit peuple a seulement pu avoir l’idée de se révolter contre vous, et vous dites : “Attends un peu, petit peuple, tu nous paieras cher cette folie !

 Pourquoi ne réfléchissez-vous pas plus sagement et ne dites-vous pas “Ce petit peuple s’est certes soulevé contre nous, mais nous allons lui envoyer des messagers et des juges de paix qui sonderont ses raisons et nous diront ensuite si ce peuple était de façon démontrable dans son bon droit.

Mais non, quand bien même vous apprendriez qu’un Dieu s’est mis à la tête de ce peuple opprimé et révolté, vous ne feriez pas cela, mais lui enverriez aussitôt une armée qui s’abattrait sur lui sans pitié ni ménagement ;

et s’il arrivait par hasard que ce peuple vous battît à quelques reprises, alors, vous vous déchaîneriez comme Belzébuth en personne, même sachant fort bien que ce peuple s’est soulevé contre vous de son plein droit.

Bref, lorsqu’un peuple a troublé votre paix et votre tranquillité, vous mettez tout en œuvre pour le punir, quand bien même, encore une fois, un Dieu bon, sage et miséricordieux l’aurait poussé à s’insurger victorieusement contre vous !

4. En certaines circonstances, l’homme ne s’interroge donc pas sur la vérité et le droit, mais il agit par une colère aveugle contre ceux qui le gênent dans son droit supposé, même s’il sait fort bien en lui-même qu’il est depuis longtemps en tort et que c’est par amour de sa tranquillité qu’il se cache derrière le mensonge et la tromperie !

5. Or, c’est le cas de la plupart des gens du Temple.

En eux-mêmes, ils savent bien qu’ils ont tort contre le peuple et contre les lois de Moïse, et que le grand Maître de Nazareth a raison, mais, comme Il les dérange dans leur tranquillité terrestre, ils Le haïssent et voudraient Le détruire, de même qu’un homme plongé dans une douce somnolence cherche à saisir et à tuer la mouche qui l’importune.

6. Tu peux certes, noble Romain, nous poser cette question : “Les gens du Temple n’ont-ils donc plus aucune foi en Dieu et dans Sa parole transmise par la bouche des prophètes ?

De par ma propre expérience vieille de bien des années, je puis te répondre qu’il n’est peut-être pas, parmi les Juifs de toute la Judée, de profanes qui aient moins de foi qu’un homme du Temple, surtout lorsqu’il avance en âge.

Les jeunes ont encore parfois quelques lueurs d’une espèce de foi aveugle : mais, à mesure qu’ils se rendent compte que les anciens, les docteurs de la loi et les chefs n’ont plus aucune croyance, ils perdent toute celle qu’ils ont, se jettent en secret dans les bras de la philosophie grecque et jouissent tant qu’ils peuvent de cette brève existence,

et le vieux Yahvé, Moïse et les prophètes ne sont plus pour eux que des enseignes, utiles parce que, à travers les préceptes et les cérémonies qu’ils consacrent eux-mêmes, elles leur rapportent des richesses toujours plus nombreuses grâce auxquelles ils vivent dans une opulence toujours plus grande.

7. Les templiers ont donc organisé les choses ainsi une fois pour toutes et ont toujours su écarter les obstacles qui se mettaient en travers de leur chemin : et ce qu’ils ont toujours fait, ils le font encore et le feront tant qu’ils dureront.

 8. Telle est donc, très clairement exposée, noble Romain, la raison pour laquelle les gens du Temple s’en prennent si violemment à ce Nazaréen, que nous considérons maintenant, nous qui sommes ici, comme le vrai Messie de la Promesse. Ils disent :

“Emparons-nous de lui et tuons-le, et nous verrons bien s’il est vraiment le Messie promis, s’il y a un Dieu et si les prophètes n’étaient pas tous des abuseurs de l’humanité !”

9. Nous n’y pouvons rien si tout le Temple pense et agit ainsi à présent, et, tant que nous dépendrons du Temple, nous ne pourrons pas faire grand-chose contre ces hurlements insensés : ce sera déjà beaucoup si nous pouvons exercer de temps en temps une influence apaisante.

À présent que j’ai répondu en toute vérité à ta question, prononce ton jugement, noble Romain ! » GEJ8 CH87 Chapitre premier (retour-du-christ.fr)

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