Doutes d’Hiram à propos de la survie éternelle de l’homme

1. Hiram, qui était le plus habile en paroles, dit : « Très cher ami, quant à comprendre clairement ce que tu nous as dit, nous en sommes encore loin ; mais nous le croyons, à cause de ta grande sagesse ;

car lorsqu’un homme a une compréhension aussi aiguë de tous les phénomènes possibles sur cette terre et va jusqu’à pouvoir lire comme à livre ouvert les pensées les plus secrètes des gens, il faut nécessairement qu’il connaisse en profondeur tous les aspects de l’existence, et nous ne pouvons donc plus entretenir le moindre doute à ce sujet.

2. Nous croyons à présent dur comme fer tout ce que tu nous as dit, et la façon dont tu nous as présenté la préexistence purement spirituelle ainsi que le développement matériel et la mise à l’épreuve de l’âme dans l’existence terrestre ne laisse pour ainsi dire plus de place aux questions,

parce qu’il est impossible d’imaginer qu’il en soit autrement — les mêmes effets précis devant nécessairement avoir toujours les mêmes causes, c’est donc pour nous une affaire entendue !

Mais en ce qui concerne l’existence ultérieure, il y a là matière à une foule de questions essentielles, auxquelles il te sera sans doute assez difficile de répondre complètement.

3. Tout d’abord, je ne parviens toujours pas à me représenter pourquoi, après la mort de notre corps, il devrait exister une vie qui, à t’en croire, serait même éternelle !

Que sommes-nous donc censés faire tout au long de cette éternité sans fin ? De quel ennui effrayant même la jouissance des béatitudes suprêmes les plus ineffables ne finirait-elle pas par s’accompagner !

Et ce serait pis encore pour un esprit parfaitement accompli, puisqu’il n’aurait naturellement plus rien à apprendre ! Il s’installerait à coup sûr dans son existence une monotonie que nous ne saurions concevoir.

4. Si l’on me propose des conditions particulièrement favorables, je veux bien vivre dix mille ans, mais dans mon corps et sur cette terre !

Car là, on n’a jamais fini d’apprendre, et nul ne peut dire : “Il n’est désormais plus rien sur toute la terre que je ne connaisse pleinement !”

Mais imaginons sur cette terre un esprit parfaitement accompli, doté de ta merveilleuse omniscience : d’un seul regard, il aura percé tous ses mystères passés et à venir !

Que fera-t-il ensuite, s’il doit demeurer strictement sur cette terre ? Il lui faudra se repaître des sottises des hommes et, pour passer le temps, provoquer entre eux, par sa puissance, toutes sortes de désordres qui les feront courir pêle-mêle — sans quoi il finira par s’ennuyer au-delà de tout ce qu’on peut imaginer !

5. Ma raison ne trouve à la survie éternelle aucun véritable motif et n’y voit pas le bonheur suprême. Après tout, la question du lieu et de l’espace préoccupe fort des gens comme nous.

Si, par exemple, les hommes continuaient de naître comme à présent sur cette terre pendant cent mille fois cent mille ans sans que toutes les mers deviennent des terres, où tous ces hommes trouveront-ils place et de quoi se nourriront-ils ? Et dans quel espace iront tous ces esprits qui vivront éternellement ?

Car il faut bien que les esprits soient eux aussi quelque part dans l’espace, puisque aucune existence n’est concevable hors de ce cosmos qui, selon Platon, doit être immense.

6. Aussi, selon moi, est-il bien plus logique et plus conforme à la raison pure de supposer qu’il y ait une survie temporaire plutôt qu’une survie éternelle bien peu compatible tant avec la notion de joie de vivre qu’avec celle d’espace.

Et si nous considérons les choses sous leur vrai jour, il nous semble, pour nous du moins, que l’anéantissement définitif d’un être ayant vécu provisoirement demeure bien préférable à toute survie, si avantageuse soit-elle,

et mon sentiment profond me répète ceci : n’en déplaise à toute la sagesse humaine même la plus haute, la mort physique est bien la fin dernière de toute chose ! — Qu’as-tu à répondre à cela, noble et très merveilleux ami ? » GEJ5 CH185  untitled (retour-du-christ.fr)

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