1. (Zorel 🙂 « Maintenant, l’ami me dit : “Viens, Zorel, quitte ces lieux, et je te conduirai dans une autre contrée !”
2. Je m’en vais à présent avec le bon ami, très loin par-delà le lac. Nous suivons maintenant une très belle avenue, et les arbres s’inclinent devant celui qui me précède. Il doit être quelque chose de très important dans le royaume des esprits ! Oh, certains de ces arbres se cassent presque, tant ils s’inclinent !
3. Toi, Zinka, tu es bien avec nous, mais tu as une apparence très nébuleuse et tu ne sembles pas remarquer les arbres qui s’inclinent devant mon ami ! C’est une chose bien étrange pour ce monde, mais c’est pourtant la vérité !
4. Étonnant, étonnant ! À présent, les arbres se mettent à parler ! Ils murmurent à haute et intelligible voix : “Salut au Sauveur des sauveurs, salut au grand roi des rois d’éternité en éternité !” 5. Ne trouves-tu pas cela particulièrement remarquable ?!
Mais, c’est bien ennuyeux, tu fais comme si tu ne voyais rien, ou comme si ce n’était qu’un phénomène tout à fait habituel, comme une vulgaire pluie sur la terre !
6. Cependant, l’ami devant qui les arbres s’inclinent en chantant sa louange me dit que ce qui nous suit et te ressemble n’est pas vraiment toi, mais seulement la forme de ton âme dont l’ombre se manifeste dans notre atmosphère.
De ton âme part, comme d’une lumière, un certain rayonnement vital ; lorsque ces rayons ont atteint notre atmosphère, ils ont pris forme un peu de la même manière que, le jour, les rayons qui partent d’un homme prennent aussitôt l’apparence de cet homme en tombant sur la surface d’un miroir.
7. Je pourrais regarder tes pieds et m’assurer que tu ne nous accompagnes qu’en flottant comme une ombre et non en marchant.
Et c’est vrai, tu ne bouges ni pieds ni mains, et tu nous suis pourtant à une distance de sept bons pas ! Oui, je comprends maintenant pourquoi tu ne vois pas les arbres s’incliner et n’entends pas leur merveilleux chuchotement !
8. Cependant l’avenue devient de plus en plus étroite et les arbres de plus en plus petits, mais en même temps de plus en plus serrés ; ils ne cessent pas pour autant de s’incliner et de murmurer.
Mais le chemin est toujours plus pénible. L’avenue est à présent si étroite et le chemin si encombré d’épines et de broussailles que nous ne passons plus qu’à grand-peine !
On ne voit pas encore le bout du chemin, bien que l’ami dise que nous l’atteindrons bientôt et que nous serons arrivés.
Oh, les buissons sont à présent vraiment denses et le sol presque couvert de pierres, et entre les pierres il n’y a qu’épines et chardons ; si cela continue, nous ne pourrons bientôt plus avancer !
9. Je demande à l’ami pourquoi nous avons pris un chemin si irrémédiablement mauvais. Mais l’ami répond : “Regarde à droite et à gauche, et tu verras des deux côtés une mer sans fond ! Ce chemin, bien que très étroit et épineux pour finir, est la seule bande de terre ferme qui s’étende entre ces deux mers sans fin.
Elle relie tout le monde terrestre à la grande terre du paradis des bienheureux. Celui qui veut y parvenir doit se satisfaire de ce chemin, car c’est le seul !”
10. Voilà, Zinka, l’étonnante réponse que vient de me faire l’ami qui guide mon indigne personne ! Mais je le questionne encore et lui dis : “Il y a aussi dans le monde de très mauvais chemins,
mais les hommes ont des remèdes à cela ; ils prennent des pioches, des crampons et des cordes et rendent le chemin meilleur. Pourquoi cela ne se fait-il pas ici ?”
11. Et l’ami me répond : “Parce que ces épaisses broussailles servent précisément à protéger cette langue de terre des tempêtes souvent très violentes de la mer ! Si cette unique bande de terre ferme n’était pas solidement protégée par cette broussaille compacte, les flots puissants de la double mer l’auraient depuis longtemps emportée par leur violent ressac.
Mais, grâce à l’enchevêtrement de ce taillis épineux, surtout vers les deux rives, ils se brisent contre lui et déposent entre ses branches serrées leur écume qui se solidifie peu à peu en pierre,
et c’est ainsi que cette langue de terre si essentielle se renforce au contraire de plus en plus. Sache aussi qu’elle a nom Humilité et Vérité première. Car toutes deux, l’humilité comme la vérité, ont de tout temps été pour l’homme pleines d’épines !”
12. Voilà, Zinka, ce que m’a dit l’ami, et il se fait à présent en moi une clarté singulière, et je commence à percevoir une sensation dans mon cœur, une sorte de mouvement ; ce qui se meut est une lumière, et il y a au centre de cette lumière une forme qui ressemble à l’embryon dans le sein de la mère.
C’est parfaitement net — je le vois. Mais le voici qui devient de plus en plus grand et fort !
Ah, quelle lumière merveilleuse et parfaitement pure ! C’est certainement la flamme même de la vie née de Dieu dans le vrai cœur de l’homme ! Oui, oui, c’est bien cela ! Elle grandit à présent en moi, et, ah, quel bien cela me fait !
13. Nous marchons toujours sur l’étroit sentier ; mais les broussailles et les épines ne me troublent plus à présent ; je ne ressens d’ailleurs plus aucune douleur lorsque quelque épine me pique ou me déchire encore !
Maintenant, les buissons s’éclaircissent, les arbres redeviennent plus grands, et une magnifique avenue se dessine à nouveau. La broussaille s’interrompt tout à fait, la langue de terre s’élargit, les rivages des deux mers s’éloignent de plus en plus de nous,
et je vois déjà, bien qu’encore très loin, une merveilleuse terre aux très belles montagnes, et je vois rayonner au-dessus des montagnes comme une magnifique aurore !
Cependant, nous ne sommes pas encore sortis de l’avenue, qui continue de s’élargir, et les arbres, à présent très hauts et très grands, n’ont pas cessé d’incliner leurs majestueuses frondaisons devant mon ami et mon guide, et leur murmure ressemble à présent au son des plus belles harpes aux accords les plus purs !
14. Ô Zinka ! Oui, cela est vraiment d’une beauté indescriptible ! Et tu continues de flotter à notre suite, toujours aussi muet, mais tu n’y peux rien, bien sûr ; car ce n’est pas toi, mais seulement ton image fugitive.
Ah, si tu pouvais toi aussi voir cela, mais en garder ensuite la trace vivante jusque dans la vie terrestre — quel homme remarquable lu serais alors ! Je le pourrais moi aussi, s’il me restait un quelconque souvenir de tout cela ; mais je n’en garderai rien !
Pourtant, me dit l’ami, avec le temps, le souvenir vivant de tout cela devrait m’être rendu ; mais auparavant, je devrai parcourir également dans la chair ce chemin épineux, quand je le trouverai. » GEJ4 CH52 GEJ4.pdf (retour-du-christ.fr)