1. A la demande de Jules, qui ne savait que répondre à Suétal, Mathaël, qui se tenait à son côté. dit : « Qui donc vous dit que vous êtes ou que vous n’êtes pas dignes de poser le pied en ce lieu ? Dans quel livre de quelle sagesse est-il donc écrit qu’un malade ait jamais pu ne pas être digne de son médecin ? Ce qui vous fait supposer cela, c’est la sagesse moutonnière du Temple, qui va jusqu’à faire griller au feu les mains de celui qui touche d’une main non consacrée le seuil de la porte qui mène au Saint des Saints ! Mais quand les premiers Pharisiens, contre une belle somme, y conduisent les étrangers chaque jour en secret pour leur montrer tout ce qu’il y a là et leur en raconter l’histoire, on ne va certes pas griller ensuite au feu les mains de ces étrangers !
2. Que voulut donc exactement signifier Dieu lorsque Il ordonna à Moïse de retirer ses sandales ?
3. Voyez-vous, Il lui disait par là : “Défais-toi de ce qu’il y a en toi de sensoriel et de matériel, éloigne de toi, par ta volonté, le vieil Adam de chair et tiens-toi devant Moi comme un homme purement spirituel, sans quoi tu ne pourras entendre Ma voix et Je ne pourrai faire de toi le guide de Mon peuple
4. Quant à l’ascension de la montagne, que signifie-t-elle ?
5. Moïse fuyait Pharaon qui le recherchait pour le meurtre d’un haut fonctionnaire du roi, car ce fonctionnaire était pour le roi presque un fils.
6. Cependant. Moïse jouissait d’un grand crédit auprès de Pharaon, au point qu’il n’était pas encore certain alors qu’il ne deviendrait pas un jour, comme Joseph, souverain de l’Égypte, élevant ainsi son peuple.
7. C’est cette ambition que Dieu lui montra dans le désert en lui faisant entreprendre l’ascension de la montagne, dont il ne devait toutefois pas atteindre le sommet, car il en fut empêché par le buisson ardent.
8. Et ce qui est dit ensuite signifie, dans notre langage : “Tu deviendras bien le sauveur de Mon peuple, non pas comme tu le crois, mais de la manière que Je t’indiquerai, Moi, ton Dieu et ton Seigneur !
9. Tu ne dois pas devenir roi d’Égypte et faire ainsi de Mon peuple, que J’ai instruit jusqu’ici dans l’humilité, un peuple égoïste et arrogant : Mon peuple doit quitter ce pays et venir avec toi dans ce désert ! Là, Je donnerai des lois à Mon peuple, et Je serai Moi-même son maître et son guide et s’il Me demeure fidèle, Je lui donnerai le pays de Salem, où coulent des ruisseaux de lait et de miel.”
10. Voyez-vous, en S’adressant ainsi à Moïse dans la langue imagée du temps, Dieu ne voulait aucunement signifier à Moïse qu’il devait véritablement dénuder ses pieds, mais seulement qu’il devait se dépouiller du vieil Adam, c’est-à-dire de l’avidité de l’homme matériel extérieur, qui est au véritable homme vivant ce que sont aux pieds de l’homme les sandales, qui sont par ailleurs le vêtement le plus bas. le plus superficiel, le dernier et le moins indispensable.
11. Quant au lieu que Dieu désigne comme sacré, c’est seulement un état de très grande humilité de l’âme, état sans lequel l’âme ne peut survivre face à l’amour éternel, qui est un véritable feu élémentaire de vie.
12. Et le buisson d’épines que l’on voit brûler signifie que le chemin du prophète sera semé de nombreuses épines mais son grand amour envers Dieu et envers ces frères, qui ce manifeste comme la flamme au-dessus du buisson et l’embrase tout entier, émoussera les pointes des épines du buisson et finira par brûler toutes les ronces, ouvrant un chemin sans épines.
13. Voilà le sens de la phrase que tu as citée tout à l’heure ! Et puisqu’il en est incontestablement ainsi, comment peux-tu considérer quelque lieu que ce soit sur terre comme plus ou moins sacré ?
14. Retirez vous aussi vos sandales mondaines et humiliez-vous dans tous les aspects de la vie, et vous serez aussi dignes que nous tous de demeurer ici car nous sommes tous ici des hommes parfaitement égaux devant Dieu, devant Celui qui est ici et aucun d’entre nous ne vaut plus qu’un autre ! »
15. Ayant entendu ces paroles de Mathaël, Suétal dit : « Ah, lorsqu’on est empli en ci grande abondance d’une telle sagesse, il est certes facile d’être sans crainte : car un voyant progresse aisément, tandis qu’un aveugle doit sans cesse s’assurer du prochain pas qu’il fera, et, malgré toute sa prudence et ses tâtonnements précautionneux, il lui arrive toujours de ce cogner quelque part. Mais lorsqu’on a quelqu’un comme toi, cher frère Mathaël, pour montrer le chemin, on peut toujours avancer même si l’on est un parfait aveugle ! Oh, dans ces conditions, nous restons, et nous réjouissons au-delà de toute expression de faire bientôt la connaissance de celui dont, pour des raisons d’une évidence palpable, tu as si hautement parlé ! »
16. Jules presse très amicalement la main de Mathaël et lui dit : « Grâces éternelles soient rendues au Seigneur qui t’a si magnifiquement guéri, toi et tes quatre frères ! Que n’ai-je appris de toi en ces instants, et cela en des termes si clairs et si compréhensibles, et je remarque qu’un grand jour commence à naître dans mon âme ; si cela continue ainsi, j’espère pouvoir bientôt marcher sur tes traces moi aussi ! »
17. Mathaël dit : « Et il ne saurait en être autrement ! Car il n’y a qu’un seul Dieu, une vie, une lumière, un amour et une seule vérité éternelle : et cette vie terrestre est le chemin qui y mène. Nous sommes nés de l’amour et de la lumière, par la volonté de l’amour éternel qui est en Dieu, pour devenir un amour et une lumière autonomes : nous le pouvons, et nous le devons !
18. Comment cela ? Vois-tu, noble frère, ce ne peut être que par l’amour envers Dieu et par une activité incessante de cet amour ! Car notre amour envers Dieu est en nous l’amour de Dieu Lui-même, et il mène notre âme à l’activité toujours croissante de la vraie vie éternelle, qui est en soi la plus parfaite vérité et la plus pure lumière. Ainsi, quand le jour commence à poindre dans l’âme d’un homme, c’est qu’elle est déjà très proche du but éternel de la vie et qu’elle ne peut plus faire autrement que d’atteindre ce but de la vie éternelle, qui est en soi tout ce que la vie parvenue à son accomplissement pourra jamais atteindre en toute liberté et dans une parfaite indépendance !
19. C’est pourquoi tu peux te réjouir, noble frère, car il sera bientôt donné à ton âme de voir elle aussi ce que la mienne voit dans une clarté toujours plus grande ! Et dans le plein jour de ton âme, tu comprendras la grandeur de Celui que tu nommes encore avec une certaine crainte le “guérisseur de Nazareth”.
20. En tant qu’homme, Il est certes fait comme toi et moi mais Son esprit ! Tout l’infini éternel est imprégné de la force et de la lumière de Son esprit ! – Comprends-tu bien ce que je viens de dire, noble frère ? »
21. Jules, ému jusqu’aux larmes, répond : « Oui, cher frère en vérité tellement plus noble que moi : vraiment, dans mon amour, je pourrais te serrer à t’étouffer, et je ne pourrai plus désormais contempler le Sauveur Jésus de Nazareth sans verser des larmes d’amour : ce n’est qu’à présent que je comprends le grand amour de cette fillette qui ne veut littéralement plus Le quitter d’un pas ! »
22. Suétal dit : « Dieu soit loué, nous ne devrions donc plus guère avoir de peine à le reconnaître ! Nous n’avons qu’à regarder aux côtés de qui marche cette jeune fille, et ce sera lui » – Et ils regardèrent avec attention. GEJ3 C49